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21 juin 2013 5 21 /06 /juin /2013 22:11
Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

Cet article est également publié sur le blog des vendredis intellos.

Sur les vendredis intellos, on parle de parentalité.

Alors j'ai eu envie de mettre en avant un très beau livre sur le sujet : les heureux parents de Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart.

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

Ce livre se présente comme un album jeunesse, mais il est à mes yeux beaucoup plutôt destiné aux adultes (mais je n'ai pas eu d'occasion de le lire à des enfants un peu grands). C'est d'ailleurs à mon amoureux et moi que je l'ai offert, quelques mois après la naissance du magicien, après l'avoir fait dédicacer par les auteurs.

 

Le livre commence comme un conte de fées :

Il était une fois une sublime princesse et un vaillant prince, inséparables depuis l'instant de leur rencontre (...) Puis, une graine vint à germer dans le ventre délicat de la princesse. Les deux amoureux se félicitèrent de découvrir bientôt la joie d'être parents. (...) Mais c'était sans compter sur les multiples épreuves qui les attendaient.

Le reste du livre garde cette structure narrative, puisqu'il va lister les épreuves qui les attendent, comme un conte raconterait les épreuves d'une quête. Cela commence pendant la grossesse :

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

puis en présence du puis des bébés.

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart
Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

Les enfants grandissent. Vient l'âge des questions :

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

Puis quelques pages plus tard l'adolescence....

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

avant l'entrée dans l'âge adulte.

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

Le texte sonne juste, même si je ne me suis pas reconnue dans toutes les "épreuves" (les références à Œdipe sont par exemple trop nombreuses à mon goût).

Mais surtout, on retrouve les magnifiques illustrations d'Emmanuelle Houdart, qui réussit à mettre de la poésie et de la beauté même dans les scènes les plus triviales, puisqu'elle n'hésite pas à représenter un bébé en train de vomir, un tire-lait ou un père en train de changer une couche :

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

Chaque double page a ses teintes dominantes. Comme toujours chez Emmanuelle Houdart, l'élément végétal est très présent, mais on trouve également de nombreuses allusions au corps humain : cœur, sang...

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart

A chaque lecture, on découvre de nombreux détails. J'aime pas exemple les livres dessinés : on trouve à la fois Dolto, l'encyclopédie des pourquoi, des auteurs jeunesse comme Kitty Crowther ou Marie-Aude Murail mais aussi "le parfum" sur la page consacré aux couches !

En un mot, je trouve que ce livre réussit merveilleusement à mêler de la poésie à la réalité de la vie de parent, même dans ses aspects difficiles.

Au final, que faut-il aux parents ?

Il leur aura fallu des montagnes d'amour et des puits de sagesse.

Et pour conclure cet article, les pages de gardes de l'album :

Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart
Les heureux parents, Laeticia Bourget et Emmanuelle Houdart
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19 juin 2013 3 19 /06 /juin /2013 12:00

Ca faisait longtemps que je n'avais pas parlé de romans pour ados. Mes lectures jeunesse se sont plutôt tournées vers la petite enfance ou les albums ces derniers temps (on se demande pourquoi !).  Mais ces derniers temps je me suis replongée un peu dans des romans.

J'étais impatiente de lire le dernier Malorie Blackman, parce que j'avais adoré sa saga précédente "entre chiens et loups". Et je n'ai pas été déçue.

 

boys-don-t-cry-copie-1.jpg Résumé : Dante attend les résultats des examens qui vont lui ouvrir la porte de l'université quand son ancienne petite amie débarque.

"J'ai fixé Mélanie.

Elle n'avait pas 19 ans. Comment avait-elle pu être assez stupide pour tomber enceinte ? Elle n'avait jamais entendu parler de la pillule ?

- Dante, tu m'écoutes ?

- Hein ?

J'essayais encore d'intégrer que Mélanie était mère quand elle a pris une grande inspiration, puis une autre.

- Dante, c'est toi le père. Emma est ta fille."

Très vite, Mélanie disparait en lui laissant le bébé. A 17 ans, il se retrouve donc père d'une petite fille de 11 mois. 

 

 

Malorie Blackman n'édulcore pas les réactions de Dante : indifférence, dégoût, colère...

"Cet enfant dans mes bras était un mur de briques entre ma vie et moi. Je voulais qu'on m'en débarrasse. Je n'allais quand même pas laisser cette petite chose ruiner mes projets, gâcher mon avenir. Pourrir ma vie entière".

Même si on est dans un roman pour ados et que, comme on peut s'y attendre, la situation va évoluer assez rapidement. Dante va s'attacher à Emma, apprendre à l'aimer et finalement être incapable d'envisager sa vie sans elle.

"Je réalisais que ses pitreries avaient beaucoup plus d'effet sur moi qu'avant. Je devais me retenir pour ne pas rire trop fort avec elle ou pour ne pas lui sourire trop longtemps ou pour ne pas la laisser prendre toute la place dans ma tête.

Je ne voulais pas qu'elle prenne toute la place dans ma tête".

Cette histoire d'attachement est au centre du roman. Et elle est racontée de deux points de vue différents, celle de Dante et celle de son jeune frère Adam.

Mais on aborde également les aspects "pratiques" : le fait de devoir renoncer aux études ou à la vie sociale des jeunes de son âge, la difficulté à trouver du travail, à faire garder un bébé.

En dehors d'Emma, les personnages principaux sont des hommes. Dante, son frère, et son père. La mère est morte plusieurs années auparavant. L'arrivée d'Emma va bouleverser l'équilibre familial. Elle va obliger les membres de la famille à se parler vraiment. Et j'ai aimé les nuances que Malorie Blackman apporte : entre les personnages, il y a l'amour, l'entraide, mais aussi la rancoeur, les difficultés à communiquer ou à avouer ses sentiments. Le fait de donner la parole tour à tour aux deux frères prend alors tout son sens.

Et le monde extérieur ? Comme d'habitude chez Malorie Blackman, il est âpre et hostile. On regarde de travers Dante, père si jeune, et Adam, homosexuel qui ose l'assumer. La violence peut faire irruption à tout moment. Et c'est sans doute encore plus violent que dans sa série précédente car il n'y a plus de filtre de la dystopie, on est dans notre société dans tout ce qu'elle a de plus dur.

Un très bon roman donc, dur et exigent.

A lire dès 13 ans je pense, et pendant toute l'adolescence.

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29 mai 2013 3 29 /05 /mai /2013 12:00

Encore un de mes coups de coeur parmi les albums pour les tout-petits, une adaptation sous forme d'album d'une comptine thaï.

Chuuut ! de Minfong Ho et Holly Meade

C'est l'histoire d'une maman qui vient de réussir à endormir son bébé (ou plutôt, d'après les illustrations, son petit de 2-3 ans). Elle part en guerre contre tous les voisins indélicats et bruyants qui risquent de réveiller le bambin et de gâcher tous ses efforts

Comme nous sommes en Thaïlande et dans une comptine pour enfants, les voisins en question ne sont pas des étudiants fêtards ou des voitures qui klaxonnent, mais des animaux, des plus familiers (chat, moustique) aux plus exotiques (gibbon, éléphant). 

 

Le texte est très répétitif : la mère s'interroge sur l'origine du bruit ("allons bon, qui fait ce bruit ?"), puis s'adresse à l'animal en question : "chut, chut, pas si fort, tu sais bien que bébé dort, chut chut, moins de bruit, mon bébé s'est endormi". 

 

La douceur du texte, des illustrations aux couleurs douces, rehaussées d'un trait orange, la sérénité qui s'en dégage, en font une lecture idéale pour un moment calin. Au dela du plaisir, pour les enfants, de la découverte des animaux, des bruits qu'ils font (je suis très nulle pour faire l'éléphant), j'aime le message plein d'amour. Je pense que c'est un livre idéal pour un rituel de coucher (même si chez nous on ne peut pour le moment pas intégrer de lecture à ce moment là) parce que le rythme du texte en fait une bonne berceuse et surtout que l'enfant peut être rassuré, même quand il dormira, sa maman continuera à penser à lui et à s'occuper de lui. 

 

Chuuut ! de Minfong Ho et Holly Meade
Chuuut ! de Minfong Ho et Holly Meade
Chuuut ! de Minfong Ho et Holly Meade

Un petit détail que j'adore, et qu'on ne remarque pas forcément à la première lecture. Regardez l'image juste au dessus. Est-ce que le petit garçon est vraiment endormi ? Non, il s'est échappé de son hamac et se promène ! On peut ainsi le chercher sur chaque double page et s'amuser du décalage texte/image. 

Chuuut ! de Minfong Ho et Holly Meade
Chuuut ! de Minfong Ho et Holly Meade

Le magicien a adoré ce livre.

Et plus largement, il est devenu une référence familiale. Quand c'est son papa qui s'occupe du magicien le dimanche matin, je l'entends parfois lui dire "chut chut, magicien, pas si fort, tu sais bien que maman dort, chut chut magicien, moins de bruit, ta maman s'est endormie" !

 

 

Chuuut ! de Minfong Ho et Holly Meade

A noter que les mêmes auteurs ont publié un autre livre exactement sur le même principe (même type d'illustration, là encore c'est le parent qui entend un bruit, se retrouve face à un animal et s'adresse à lui, et on retrouve à chaque page la présence de l'enfant à l'insu du parent), sauf que cette fois c'est un papa qui cherche sa petite fille qui s'est cachée. Ce titre n'est malheureusement plus édité mais on le trouve encore en bibliothèque.

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3 mai 2013 5 03 /05 /mai /2013 12:00

J'aime les histoires et les textes.

Mais depuis peu, je me mets à apprécier aussi les imagiers. Parce qu'ils sont des supports d'échanges précieux avec les enfants. On peut les utiliser comme support de découverte (et cet animal, tu sais comment il s'appelle ?) mais aussi en livre jeu (Retrouve la grenouille !). Et parce que, pour certains d'entre eux, ils sont magnifiques. 

 

Je vous ai déjà parlé d'Axinamu de Pittau et Gervais, il y a quelques temps. Et il faudra que je vous parle plus en détail des livres des saisons de Rotraut Susanne Berner. Mais aujourd'hui, j'avais envie de mettre l'accent sur deux livres de Joelle Jolivet. 

 

On commence avec Presque tout :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

Ce très grand format (46x33 cm) propose des doubles pages thématiques, sur des sujets très variés.

On retrouve par exemple les fruits et légumes :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

les bateaux :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

ou les engins de chantiers (cette double page a beaucoup de succès !) :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

mais aussi les animaux, les costumes du monde, le corps humain...

On a donc des magnifiques planches pleines de détails, avec à chaque fois le nom de l'élément représenté. A la fin du livre, quelques pages de "notes" donnent des détails, des anecdotes, sur les différents éléments.

A noter : ce titre existe également en petit format cartonné, "Mini presque tout".

Un autre imagier, sur le même principe, mais entièrement consacré aux animaux : "Zoo logique".

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

Le sujet est habituel, mais au-delà de la beauté des planches, ce qui est original, c'est le classement.

Le livre commence en effet par un classement relativement classique, le lieu de vie des animaux. On trouve par exemple les animaux qui vivent dans la mer :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

ou dans les arbres :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

Mais on trouve aussi les animaux noirs et blancs :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

les animaux à rayures ou à tâches :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

les animaux géants ou minuscules :

Imagiers : Presque tout et zoologique de Joelle Jolivet

Désolée pour les photos ratées, mais la bibliothèque est éclairée avec des néons... On va dire que c'est pour vous inciter à aller voir les livres en vrai !!

(à part ça, je pars en vacances à Lyon la semaine prochaine donc je risque de me faire un peu rare ici, mais j'essaye de passer de temps en temps, promis !)

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26 avril 2013 5 26 /04 /avril /2013 12:00

Cet article est également publié sur le site des vendredis intellos.

vendredis intellos

 

Après une  introduction sur l'injonction au genre, une  première partie sur la place des jouets dans la construction de la féminité et de la virilité, une  seconde partie sur la norme hétérosexuelle, voilà la troisième partie consacrée aux alternatives et luttes.  

contre les jouets sexistes

 

Alternatives concrètes pour les parents : (c'est moi qui ajoute cet intertitre)

Comment permettre aux enfants de sortir des normes aliénantes et de se développer en tant que personne ? Cette partie tente de proposer des propositions concrètes.

  • Privilégier les jouets sans scénario trop clairement défini, qui laissent de la place à l'invention. "Pour constituer un support de créativité idéal, le jouet doit être suffisamment neutre et riche"
  • sortir du consumérisme, acheter des jouets d'occasion dans les brocantes et profiter du réseau des ludothèques... (j'avoue être sceptique par rapport à ces propositions. Si j'en comprends l'intérêt écologique ou anticapitaliste, il me semble que selon le choix du jouet, ça peut être tout aussi sexiste)
  • encourager la circulation des jouets entre les sexes. Les jeux de construction ou d'initiation aux siences gagneraient à être investis par les filles, les jeux liés à la mode, au déguisement, au maquillage devraient être autorisés aux garçons. "Quant aux jeux de pouponnage, ils sont communs à tous les jeunes enfants, qui ont besoin de transposer leur vécu dans leur relation avec leur poupée. Garçons et filles devraient pouvoir jouer librement aux parents." 
  • Valider ou suggérer des scénarios familiaux moins normés (autant je suis entièrement pour laisser les enfants jouer comme ils le souhaitent, autant j'ai du mal avec l'idée de "valider" un scénario de jeu)
  • les encourager, filles comme garçons, à participer à la vie quotidienne (dans la mesure de leurs capacités) plutôt que de leur offrir certains jeux d'imitations (par exemple faire participer les enfants au ménage plutôt que leur offrir un aspirateur en plastique)
  • encourager les jeux fondés sur la perception, les jeux manuels (bricolage, sculpture...), autour du son (musique, chant...), les jeux qui utilisent l'environnement (cerf-volant...). Mais aussi la pratique du sport. Le livre insiste sur l'intérêt pour les petites filles de pratiquer les arts martiaux afin de "désapprendre la passivité et renverser le mythe de la fragilité" et pour les petits garçons de pratiquer la danse pour "appréhender leur corps comme un moyen d'expression". Il fait l'éloge des jeux du cirque qui permettent à la fois une alternative à la compétition, une exploration des possibilités corporelles (équilibre en particulier) et la possibilité de créer des émotions chez le spectateur. La pratique du théâtre pour prendre confiance en soi, encourager la coopération et la créativité, se familiariser avec la communication verbale et non verbale.
  • Eduquer contre la violence : "nous considérons que les jouets guerriers, parce qu'ils banalisent la guerre et l'assassinat, doivent être écartés des objets offerts aux enfants. Ils représentent un encouragement à l'agressivité, une légitimation des conflits réels et conditionnent à ne pas prendre en compte les souffrances produites par ces armes. Il faut d'ailleurs éduquer contre la violence au sens large, en refusant la violence éducative. Il ne faut cependant pas faire de la violence un tabou et parler avec les enfants de la violence et de l'injustice.
  • Parler de sexisme aux enfants pour leur offrir des "outils de compréhension" et "lui faire comprendre que, s'il le souhaite, il peut oeuvrer pour modifier la société dans laquelle il vit"

 

Pour une socialisation alternative des jeunes enfants par le jeu :

Le livre souligne l'importance du jeu pour l'enfant. Le jeu doit être principalement mené par la dynamique des enfants, sans qu'ils soient contraints par des règles ou par la valorisation/stigmatisation de certains comportements, les enfants étant très sensibles aux réactions des parents. Quelques pistes pour permettre une liberté de choix de la part des enfants :

  • demander l'avis des enfants sur leurs propres pratiques et éviter les évaluations. Par exemple au lieu de juger un dessin (même positivement avec "oh c'est beau"), demander à l'enfant s'il en est content.
  • ne pas noyer les enfants sous une trop grande quantité de jouet. Pas toujours évident... Mon homme et moi avons pris la décision de n'acheter, pour le moment, aucun jouet au magicien. Mais rien qu'avec les cadeaux, il en a une quantité impressionnante ! Mais on fait attention à ne pas lui en proposer trop à la fois (sur les conseils d'une puericultrice de la PMI qui nous a dit : jamais plus de un ou deux jouets à disposition sur le tapis d'éveil).
  • privilégier les jeux de construction qui sont "un excellent moyen d'appréhender le monde qui les entoure" et dont les scénarios varient à l'infini.  
  • être vigilant à l'utilisation sexiste du langage. Ca peut passer par éviter l'emploi systématique du masculin pluriel seul qui invisibilise les filles (on peut très bien dire "les copains-copines" par exemple) ou, pour les éducateurs-trices, en évoquant uniquement les mamans avec des phrases comme "maman t'a bien coiffé ce matin". J'ai d'ailleurs vu avec plaisir le changement chez ma mère, instit, qui ne dit plus "l'heure des mamans" mais "l'heure des parents" à 16h20. 
  • Etre attentif aux choix de l'enfant et montrer de l'empathie
  • Eviter le distingo rose ou bleu en proposant un panel de couleurs plus large
  • Réfléchir à l'aménagement de l'espace (crèches, classes, mais aussi chambre d'enfant), au choix des jeux à disposition, afin d'offrir un maximum de possibilités
  • L'intervention de l'adulte dans l'organisation des jeux est intéressante si la formulation des règles n'est pas restrictive mais va dans le sens de l'élargissement des possibles
  • Promouvoir des modèles d'hommes et de femmes qui présentent des qualités intéressantes à développer

Si on veut que les mentalités évoluent, il est indispensable que les adultes aient réfléchi à ce problématiques. Il faudrait donc y réfléchir lors de la formation des professionnel-le-s de la petite enfance, réfléchir à ce que le fait que ces métiers soient très féminins implique dans la construction identitaire des enfants et y encourager la mixité.

Un chapitre est également consacré aux livres pour enfants non sexistes, c'est trop long pour que je l'aborde ici, mais j'essayerai d'en reparler. 


 

La campagne contre les jouets sexistes :

En 2001, l'association Mix-cité lance une campagne d'action sur le sexisme dans les catalogues de jouet au moment de Noël. Plusieurs actions ont lieu dont la distribution d'un "contre-catalogue". D'autres associations se sont jointes au mouvement, comme le Collectif contre le publi-sexisme ou les panthères roses, groupe d'activiste "goiunes, trans et pédé, féministe et progressiste", ce qui a permis d'interroger le modèle du couple exclusivement hétérosexuel donné dans les jouets. 

Un des catalogues est disponible ici, mettant en scène les injonctions transmises par les jouets ainsi que leur correspondant dans le monde adulte, puis proposant quelques alternatives. Ils sont distribués près des magasins de jouets et des grandes surfaces. D'autres animations ont été proposées (expositions, chorales, etc). Des actions ont également eu lieu dans les magasins (échanges de jouets entre les rayons rose et bleu, autocollants "pour les garçons aussi" ou "pour les filles aussi" collés sur les boites, etc, occupation festives de magasins...). Des débats ont également été organisés. 

Cette action s'inscrit dans la durée puisqu'elle a lieu tous les ans. Ces actions donnent lieu à un accueil globalement positif. 

"Le public sensible à ce questionnement et à cet argumentaire semble s'accroitre"


Et voilà, on finit ce compte-rendu sur une bonne nouvelle, même si la route est encore longue !

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12 avril 2013 5 12 /04 /avril /2013 12:00

Je continue mon compte-rendu du livre "contre les jouets sexistes" aux éditions l'échappée. 

contre les jouets sexistes

Après une introduction sur l'injonction à un genre et une première partie sur la construction de la féminité et de la virilité, la seconde partie est consacrée à la norme hétérosexuelle. C'est la partie que j'ai trouvé la plus intéressante, parce que je pense qu'auparavant, j'y avais moins réfléchi que sur le reste donc j'ai découvert plus de choses. 

"La norme hétérosexuelle transparait à travers la façon dont les gens réagissent face aux petits garçon s'aventurant à jouer à des jeux "féminins" et à travers la représentation de la famille".

 

Le contrôle de l'identité de genre :

Les garçons sont détournés de tout jouet dits féminins alors que les filles peuvent plus facilement s'approprier les jeux ou jouets de garçons. Les insultes de "tapette", "femmelette", "pédé" sont plus souvent utilisées pour dénoncer le non respect des "attributs masculins" que par rapport à la véritable orientation sexuelle de la personne. Elles servent aux personnes qui les utilisent à se rassurer sur leur propre "normalité".

"Le stéréotype joue un rôle psychologique majeur, puisqu'il permet d'apaiser l'angoisse identitaire de se voir un jour déserter son statut ou de se faire rejeter par son groupe d'appartenance surtout lorsque celui-ci apparait comme le modèle à suivre" (Daniel Borillo) "L'homophobie n'est donc pas une anomalie de la société moderne, mais un de ses piliers" qui sert à réguler l'organisation en genre sexuels préétablis : "elle permet de cloisonner et d'inculquer les comportements sexués nécessaires à la reproduction patriarcale". Monique Witting écrit ainsi que l'hétérosexualité est un système politique en soi, sont la famille est la pierre angulaire. 

Ces derniers temps, je me suis souvent demandé pourquoi la loi sur le mariage pour tous entrainait une telle levée de bouclier, et pourquoi on trouvait des réflexions si violentes et si inquiètes sur les conséquences que cette loi pourrait avoir (j'ai quand même vu un prêtre dire, sur BFM télé, que si cette loi était adoptée, on allait vers la fin de l'humanité) alors qu'elle n'allait concerner directement qu'un petit nombre de personne. Je pense qu'on tient là une des raisons de l'ampleur du mouvement contre le mariage pour tous : la défense (inconsciente ?) des schémas préexistants et l'idée qu'accepter le mariage pour tous et l'adoption par les couples homos remettrait en cause toute l'organisation de la société en supprimant un des moyens essentiels de contrôle de l'identité de genre. 

La masculinité se construit donc par une suite d'interdiction. Pour la féminité, c'est une suite d'obligation. Elles ont plus de libertés pour s'approprier des jouets de garçons car les valeurs masculines sont celles qui dominent dans notre société et sont donc jugées positivement. Cependant, la féminité a également un stigmate pour empêcher la transgressions des limites : celui de la pute.


La représentation du couple et de la famille :

La famille fantasmée composée de deux parents hétérosexuels aux rôles différenciés et hiérarchisés avec deux enfants, un garçon et une fille, est le modèle le plus courant et est présenté comme l'idéal à atteindre. On le voit par exemple avec la représentation des familles dans les boites playmobils : que ce soit  à la préhistoirechez les romainschez les chevaliersau skisur un bateauautour du sapin de Noëldevant un camping carsur un autre bateau, on retrouve quasiment toujours ce modèle. 

playmobil-prehistoire.jpg


Le père chasse, la mère fait la cuisine, un garçon, une fille, c'est bon, on est dans les stéréotypes dès la préhistoire !


Le rapport entre filles et garçons est rapidement investit par les adultes de la volonté de fabriquer un couple hétérosexuel. Les enfants sont souvent taquinés par leurs aîné-e-s sur le mode "tu as un-e petit-e amoureux-se ?" Lors des rencontres parents/enfants à la PMI où je vais, j'ai entendu plusieurs fois des mamans dire "ah mais non, machin c'est l'amoureux de bidule" ou "X se mariera avec Y" en parlant de bébés de quelques mois, j'ai toujours trouvé ça absurde. 

 L'importance du couple n'a toutefois pas la même importance dans l'univers des garçons dont les filles sont souvent absentes et dans l'univers des filles où l'homme est présent, presque toujours sous les traits du prince charmant. Traits qui ne correspondent d'ailleurs pas à l'idéal masculin proposé aux petits garçons (on peut prendre l'exemple du chanteur de Tokyo Hotel qui a (eu?) beaucoup de succès auprès des préadolescentes alors qu'il se maquille, qu'il parle de ses émotions, chante des chansons d'amour... ce qui ne correspond pas aux critères de virilité proposés aux petits garçons). Le couple et la recherche d'un partenaire deviennent constitutifs de l'identité féminine. 

Ce qui explique qu'une fois adultes, ce sont les femmes qui sont le plus souvent chargées de faire durer les relations de couple. Il n'y a qu'à regarder les magazines : dans la quasi totalité des magazines féminins, une part très importante est consacrée au couple et aux efforts à faire pour le faire durer, je doute que l'on retrouve cela dans les magazines masculins.


"Les enfants n'ont pas accès, dans les jouets ou leur environnement, à une représentation diverse (...) des relations amoureuses : la quasi totalité des dessins animés finit par l'idée "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants (...). Le couple hétérosexuel est toujours le seul modèle proposé et valorisé."

Ca me rappelle une conversation avec un ami homo il y a quelques temps. Son homosexualité a été tout a fait acceptée par sa famille, à l'adolescence. Mais pendant son enfance, que ce soit dans les jouets, les livres, les dessins animés, son entourage, les discours de sa famille, on ne lui "proposait" qu'un futur avec "une chérie", "une femme", des enfants. Et il en a souffert. Il se sentait anormal, a même traversé une période où il voulait être une fille, parce que elles, elles étaient "autorisées" à aimer des garçons. Il me racontait que quand il avait 10 ans, il a vu un reportage sur la gay pride à la télé, et que ça a été un soulagement immense, parce qu'il a pris conscience qu'il y avait d'autres hommes qui aimaient les hommes. Je pense donc qu'il est important de laisser aux enfants une "porte de sortie" vers d'autres situations que la famille hétérosexuelle traditionnelle (j'ai pris l'exemple de l'homosexualité, mais on peut aussi parler du fait de rester célibataire, d'avoir une famille recomposée, d'adopter des enfants, d'avoir une famille très nombreuse etc etc). Cela peut passer par des jouets qui proposent des modèles différents, ou par l'utilisation différente des jouets (pour reprendre l'exemple des playmobil, on peut facilement s'éloigner du propos porté par les boites). Cela peut passer par des livres pour enfants aussi. Par exemple  la collection "les petites familles", à l'école des Loisirs, présente aux tout-petits de nombreux livres avec des familles "atypiques" dont la famille homoparentale avec le titre  Jean a deux mamans. (Pour découvrir d'autres livres pour enfants sur l'homosexualité et l'homoparentalité, allez voir cet article de la mare aux mots !). Cela peut passer par le discours des parents ou l'entourage de l'enfant. Ce même ami m'a d'ailleurs dit qu'il était heureux que ses neveux et nièces puissent voir l'homosexualité comme quelque chose de naturel et d'habituel, et je suis contente qu'il fasse partie de l'entourage de mon fils pour ces raisons (entre autres).

 

Le sexisme et l'homophobie sont donc étroitement liés. La semaine prochaine, j'arrête avec ces constats un peu déprimants et énervants pour mettre en avant les alternatives et les luttes possibles contre le sexisme dans les jouets !


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5 avril 2013 5 05 /04 /avril /2013 12:00

Cet article est également publié sur le blog des  vendredis intellos.

vendredis intellos

 

J'ai commencé le compte-rendu du livre "Contre les jouets sexistes" la semaine dernière, avec un article d'introduction sur l'injonction présente dans le choix des jouets. Voilà maintenant la première partie, qui analyse comment les jouets participent à la construction sociale de la féminité et de la virilité.       

(je reprends le même principe : en noir, le résumé du livre, en bleu, mes commentaires personnels). 

 

La construction de la féminité  

Il s'agit d'un "travail de dépréciation qui doit conduire la fillette à se résigner à jouer un rôle subalterne dans la société" et d'un "dressage à la délicatesse". 

Beaucoup de jouets a priori neutres sont bien souvent faits pour les garçons : on voit ainsi parfois à côté d'un jouet "neutre" sa déclinaison spéciale fille (même si les "légos pour fille" n'existaient pas au moment de la publication du livre, il me semble que c'est un bon exemple)

"La séparation entre garçons et filles n'a rien d'équitable : le masculin représente la norme et le féminin la différence".

Les filles reconnaissent les valeurs considérées comme masculines (action, compétition, domination...) comme étant les valeurs dominantes de la société. Les filles sont donc plus enclines à s'approprier des jouets traditionnellement destinés aux garçons que l'inverse, les rôles masculins étant valorisés dans la société alors que les rôles féminins sont dévalorisés.

Les jouets de filles sont directement liés aux rôles que les femmes doivent "jouer" dans la société : la mère, la femme séduisante, la ménagère et l'amoureuse.  

     

 

La maternité : 

L'un des rôles majeurs que la société patriarcale confie aux femmes est celui de mère. Les poupons, poupées et accessoires sont proposés aux petites filles dès 3 ans. Elles "deviennent ainsi familières du type de soins que nécessite un tout-petit". Les auteurs considèrent que cela explique le désir d'enfant et le fait que les femmes s'impliquent plus dans l'éducation des enfants beaucoup plus qu'un hypothétique instinct maternel. 

Quand le magicien est né, le truc qui mettait son papa mal à l'aise, c'était de l'habiller. Il n'avait jamais eu l'occasion d'habiller un bébé aussi petit et ça lui paraissait une montagne. Je n'avais jamais non plus habillé de nourrisson, et pourtant ça me semblait naturel. Et j'ai remarqué la même chose dans les couples de notre entourage. Un des oncles du magicien va être papa, il nous a demandé plusieurs fois de lui montrer "comment on faisait". Et je pense que le fait que le fait que ce soit présenté comme "naturel" pour les femmes et pas pour les hommes dès l'enfance y est pour beaucoup.

Toujours dans cette lignée, on propose également aux filles de jouer à la maîtresse ou à l'infirmière. Si les soignantes sont nombreuses dans les jouets , quand un médecin ou un secouriste est représenté, il s'agit d'un homme. "Aux filles les professions donnant les soins au quotidien (...) aux garçons les professions prestigieuses nécessitant un savoir scientifique ou une maitrise technique". 

hopital-playmobil.jpg

Un médecin, une infirmière ou aide soignante qui pousse un fauteuil roulant, une secrétaire médicale.

 

Les tâches domestiques : 

En France, les femmes effectuent encore 80% des tâches ménagères. "Vu les objets que l'on offre aux petites filles, ce n'est pas très étonnant !" On trouve bien sur tout ce qui touche à la cuisine, mais aussi des jouets ustensiles de ménage (aspirateurs, planches à repasser).

Quand on tape "jouet aspirateur" dans google image, sur 10 images issus de catalogues de jouet où on voit un enfant, il y a 9 petites filles. 

Pour ce qui est des métiers prônés dans les jouets pour filles, on trouve les femmes de ménage, les marchandes, les caissières... "Dans la réalité, ces professions sont fortement féminisés et s'apparentent aux tâches domestiques "traditionnellement" effectuées par les femmes". 

 

La beauté : 

Il existe de nombreux jeux invitant les petites filles à se faire belle, soi-même ou via une poupée ou une tête à maquiller ou coiffer. Ils "visent principalement à lui apprendre la séduction". 

Les poupées mannequins, et en particulier la barbie, sont des modèles stéréotypés de la féminité aux mensurations irréelles.

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En pointillé, les proportions de la Barbie rapportées à la taille de cette femme. 

"Chez Barbie, la valeur et la reconnaissance de soi passent exclusivement par le corps. (...) La célèbre poupée et ses condisciples enseignent aux filles le "devoir (social) de beauté" qui incombe à leur genre"

"La fillette découvre ainsi dès son plus jeune âge les artifices de séduction qui ne pourront que lui apparaître "naturels" à l'âge adulte". (voir cet article du blog Les questions composent : " je le fais pour moi-même").

Le livre souligne ensuite que de nombreux jeux créatifs pour petites filles concernent la mode et l'apparence (jeux pour dessiner des robes, fabriquer des bijoux...). Dans le manuel des filles de Nathan, l'essentiel des activités concernent la beauté, la cuisine, la fabrication d'accessoires et de bijoux. 

Le numérique ne fait que renforcer le conditionnement des jouets en proposant des jeux centrés sur des activités "de filles" : lancer un magazine de mode dans le jeu mettant en scène les poupées Bratz par exemple. Et quand il s'agit de lutter contre des méchants, il s'agit de "combattre le mal avec élégance", et ouf, entre deux combats, on peut "changer de tenue (...) dans le placard magique" (jeu Winx Club). Pour illustrer ce passage, allez jeter un coup d'oeil sur le site internet Barbie

Et pour les jeux et activités en extérieur, "il faut aussi maîtriser son attitude et ses mouvements". Dans les cours d'école, les activités "de filles" (corde à sauter, élastique) sont très ritualisées et délimitées dans l'espace et "consistent à faire du sur place". Le choix des sports est également très genré. Dans le livre "c'est génial d'être une fille" , on apprend que la danse permet de se dépenser "gracieusement et en musique". "Bouger, d'accord, mais sans trop transpirer, sans mouvements agressifs, bref tout en féminité". (bon, en même temps, ce livre est édité chez Fleurus. Depuis que j'ai vu ça, cette maison d'édition a perdu le peu d'estime que je lui portais). 

"Limiter l'espace qu'elles occupent, contrôler leurs gestes pur obtenir un résultat plus esthétique qu'efficace, limiter l'affrontement physique, voilà ce qu'apprennent les filles dans les jeux d'extérieur et les sports qu'elles sont encouragées à pratiquer".

 

Les sentiments : 

"Dans le système patriarcal, la vocation de la femme est de prendre soin des autres, d'entretenir le foyer et de plaire aux hommes. Le rôle féminin repose finalement sur l'abnégation. Et celle-ci trouve sa légitimation dans une certaine vision de l'amour. L'"amour" permet de justifier le sacrifice de soi, le dévouement et le temps passé à s'occuper des autres. (...) On soigne les bébés, les animaux, les malades, son mari... parce qu'on les aime. Les jouets préparent les petites filles à évoluer dans un univers ou "l'amour" sous toutes ses formes est la valeur première (...). A travers le maternage des poupées, mais aussi des animaux, et les relations d'amitié entre filles, les fillettes s'approprient le langage des sentiments et de la sensibilité".

Là, je ne suis pas vraiment d'accord avec le livre. Pour moi, le problème n'est pas qu'on encourage les filles à s'approprier le langage des sentiments ou à passer du temps à s'occuper des autres, en particulier des plus fragiles, c'est qu'on n'encourage pas assez les garçons à le faire. (mais je dis peut être ça parce que je suis une fille et que j'ai été élevée comme telle...).

"Les jouets inculquent aux fillettes l'attente du grand évènement de leur vie : l'amour avec un grand A (...). Elles apprennent que c'est lui qui va leur permettre de se réaliser en tant que femme. Et que seul le regard masculin peut valider l'existence de la femme et la rendre heureuse". On le voit avec les nombreux jouets et histoires de princesses. Je me souviens de ma cousine qui dès 4-5 ans parlait du prince charmant dont elle serait amoureuse... Heureusement, quelques albums parlant de princesses cassent cette idée reçue, je vous en parle bientôt. 

En attendant le grand amour, les filles sont encouragées à l'amitié entre filles, si possible dans un univers girly où on parle amour, beauté, séduction, petits secrets (voir par exemple ce Girly quiz). A mon époque, le jeu à la mode, c'était le téléphone secret

On encourage également le goût des filles pour les animaux "de préférence mignons, inoffensifs et jeunes". "Le culte du "mignon" réunit à la fois la tendresse du maternage et l'émotion devant ce qui est joli". 

"L'empire des sentiments, dévolu aux filles, est en fait l'institution du sentimentalisme comme forme de relation aux autres et au monde. La pensée, la réflexion, l'esprit critique, la science, la connaissance du monde qui les entoure... semblent totalement absents de l'univers des filles tel qu'il existe dans les jouets". 

 

 

La construction de la virilité

Les jeux de garçons : "Il s'agit de jeux plus bruyants, plus énergiques, actifs et vigoureux, qui engagent plus de luttes réelles ou symboliques, plus d'activité musculaires, plus de jeux de compétition et de rivalité" (Serge Chaumier). La majorité des jeux de garçon véhiculent l'idée de domination, qui s'exerce par la technique, la conquête, la puissance et la guerre.

 

La technique : 

La raison, le savoir, la technique sont vus comme masculins alors qu'on relègue les filles du côté de l'intuition et de la créativité. Les jeux de réflexion, de stratégie, les jeux liés aux sciences dures sont plutôt réservés aux garçons. Le livre cite les jeux de bricolage, les jeux de constructions "traditionnellement masculins" qui sont des "espaces de valorisation de la maîtrise et de la technique", la glorification des véhicules et leur lien avec des métiers typiquement masculins (pompiers par ex). Et même pour jouer au docteur, c'est l'aspect chef et maîtrise de la science qui sont mis en avant plus que le soin. 

L'informatique est également un domaine de garçon, le jeu vidéo "reste encore un espace identitaire masculin". Le livre souligne même que la profession d'informaticiens est de plus en plus masculine (20% de femmes en formation d'ingénieur en infirmatique dans les années 1980, 11% en 2000). Et même s'il ne concerne pas vraiment les enfants, je ne peux que vous conseiller cet article sur le sexisme chez les geek

"Cette division sexuelle du savoir dans les jouets se prolonge à l'école et dans les études".

 

La conquête :

"Dans l'univers des garçons, l'espace de la maison n'existe tout simplement pas. Les jouets et jeux mettent en scène des espaces sauvages (forêt, désert, espace intersidéral, océan, etc.) ou hostiles (champ de bataille, ville, etc) qui sont à conquérir et à assujétir par les armes". 

L'aspect le plus séduisant de la conquête, c'est l'aventure. Parmi les aventuriers traditionels, le chevalier, le pirate ou le cow boy. Chez les pirates playmobil, une seule femme et une seule "épouse de chevalier" dans les boites chevaliers

Nombreux sont les jeux vidéos qui s'appuie sur l'aventure. Dans ceux-ci, même lorsqu'il y a des objectifs de quêtes, le sens du jeu réside dans les combats qui permettent d'acquérir des points d'expérience. 

Et surtout, il y a la figure héroïque, qui ne connait pas la peur, surmonte la souffrance et reste toujours invincible. Il est engagé dans un combat pour sauver le monde. Du héros réel (soldat par exemple), on est passé au super-héros. Si leur rôle est de protéger le monde, c'est surtout un pretexte à la violence, ou une vengeance des humiliés sur ceux qui dominent (cf les X-Men, méprisés en tant que mutant mais qui se serviront de leur pouvoir pour sauver le monde). "Pour le petit garçon, devenir un "héros" c'est accomplir des exploits pour revêtir un statut social valorisant, lié à la virilité". "Protéger les autres est alors prétexte à la violence". Parmi les héros plus réalistes, des métiers considérés comme virils parce qu'ils comportent une grande part de risque : pompiers, policiers, espions. 

Les véhicules-jouets sont généralement réservés aux petits garçons. Ainsi, sur le site internet de Toys'r'us, dans la catégorie "véhicules radiocommandés", nous avons  126 résultats pour les garçons et... un seul résultat pour les filles (et devinez de quelle couleur est  la voiture pour fille ?) Dans les jeux vidéos, les jeux de simulation de conduite sont nombreux. Ils se basent à la fois sur la vitesse et la compétition, mais également dans certains jeux à de la violence pure, comme dans la série Grand Theft Auto où on gagne des points quand on écrase des piétons.

"A travers ces jouets, le petit garçon comprend que le monde lui appartient et que son rôle est d'y étendre sa domination. Il comprend qu'il est au coeur d'un espace infini, et qu'il n'y a nulle autre limite à son désir : s'il n'a pas l'étoffe d'un héros, un véhicule ou une arme pourra lui apporter la puissance dont il a besoin pour contrôler l'espace et maîtriser les autres."

 

La puissance :

"Les jouets destinés au petits garçons participent de façon massive à une véritable injonction à la puissance virile". 

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Le corps masculin représenté dans les jouets se caractérise très souvent par ses muscles (cf les figurines action man ou Hulk ou la "figurine de catch" visible juste au dessus). Sur le plan de l'expression des émotions, on retrouve soit de la férocité, à travers des visages grimaçants, soit la maîtrise de soi, à travers des allures glaciales. "Cette apparence froide fait écho aux injonctions permanentes à garder son sang froid". De plus, le corps masculin est présenté comme un corps machine, les armes et véhicules étant présentés comme des prolongements naturels de ce corps. "Le monopole masculin des armes et des outils (...) semble, même dans l'univers des outils, être la condition nécessaire du pouvoir des hommes". 

Le sport, et en particulier le football (1e fédération sportive de France, à 98% masculine), est omniprésent dans la culture masculine des enfants comme des adultes. "Les enfants mâles apprennent par le biais de la pratique sportive à être compétitifs, à vaincre leurs adversaires, à dépasser leurs propres limites physiques et mentales, toute ces attitudes qui seront attendues d'eux en tant qu'hommes (...). Les petits garçons intériorisent (...) un rapport à l'espace, au temps et aux objets qui est marqué par la conquête, la maîtrise, la domination". 

Là je ne suis pas vraiment d'accord. Je suis sans doute trop bisounours, mais je pense que de nombreux clubs mettent l'accent sur le jeu en équipe et sur le fair play et le respect des autres joueurs, plutôt que sur la compétition...

"Tandis que les filles auront des jeux sportifs plus restreints dans l'espace (comme la marelle, la corde à sauter), les garçons auront tendance à occuper l'espace (...) géographique, mais également l'espace sonore et visuel (par leurs cris, leurs déplacements rapides et nombreux, leur débordement d'énergie".

"Quant aux jeux vidéos de sport, (...), ils se caractérisent par une compétition en solitaire ou tout tourne (...) autour de l'argent : il faut gagner des matchs pour acheter de meilleurs joueurs, cercle vicieux dont l'objectif reste le profit et le pouvoir"

 

La guerre :

"La logique guerrière est omniprésente : il s'agit de mettre un adversaire hors d'état de nuire au moyen d'armes diverses". Il y a une "injonction à une virilité violente inhérente à ce type de jouets". On passe de la guerre fantastique (sabres lasers inspirés de la guerre des étoiles par ex) à la guerre réaliste. Mais dans les deux cas, les jouets "se caractérisent principalement par une surenchère des armes" comme on le voit dans cette boite de figurine de lance-missile dont le déscriptif précise bien que les soldats "disposent de nombreuses munitions". "L'arme devient le prolongement nécessaire du corps viril" "Mais avoir une arme, cela signifie s'en servir, et les petits garçons l'ont bien compris (...) Qui n'a pas constaté la violence avec laquelle ces "armes' sont utilisées par les petits garçons pour frapper leurs soeurs ou des camarades plus jeunes qu'eux ? Non seulement cette violence est tolérée car "on joue", mais en plus elle est stimulée par ces jouets guerriers qui fournissent à la fois le prétexte et l'accessoire pour s'y livrer dans l'impunité la plus totale". 

Les jeux vidéos de guerre sont nombreux et consistent à tuer des ennemis, quelqu'ils soient. Le monde militaire y est mis en scène de façon réaliste. Des soldats admettent d'ailleurs avoir été formé à la guerre à travers leur pratique des jeux vidéos dans l'enfance et l'adolescence. On peut rapprocher ces passages des déclarations du prince Harry : «C'est une joie pour moi (d'envoyer un missile) parce que je suis quelqu'un qui adore jouer à la PlayStation et la Xbox, donc je pense que je suis assez utile avec mes pouces.» Mais même si la mort y est présente, les corps des victimes se volatilisent rapidement. "Quelle responsabilité face à autrui ces jeux violents apprennent-ils aux enfants, si les conséquences de leurs actes ne sont pas visibles ?"

"Conquérir le monde grâce à la puissance, à la guerre, à la technique et au savoir : voilà le message qu'adressent aux petits garçons les jouets qui leur sont destinés. Apprendre à devenir un homme, c'est apprendre à agir sur le monde et à le transformer, faire de son corps un instrument froid et efficace de domination, cultiver la froideur calculatrice, le sentiment de victoire. Les rapports humains mis en scène dans les jouets sont marqués par une logique d'affrontement, de maîtrise".

Pour les auteurs, les jouets pour garçons "dépassent les frontières de l'âge" avec des adultes qui collectionnent les (petites) voitures ou sont fans de foot parce que la vie héroïque promise par ces jouets ne correspond pas à leur vie réelle et que rester dans cet univers du jeu est le seul moyen de les retrouver. (je devrais dire ça à mon mari quand il passe ses soirées à jouer à World of Warcraft).

Les jeux guerriers dominent l'offre faite aux petits garçons et sont nocifs pour tous. En revanche, les jeux basés sur la technique sont intéressants parce qu'ils "proposent une autre vision du monde aux enfants" et les petites filles devraient également se les approprier". 

 

Et voilà pour cette partie de constat, un peu déprimante. J'espère quand même que seulement une petite partie des enfants sont contraints à rester strictement dans les jouets destinés à leur genre. Mais je pense que malheureusement les injonctions sont si nombreuses qu'il est difficile d'échaper entièrement à ce conditionnement, malgré la bonne volonté des parents. 

La semaine prochaine, je vous parle de la représentation de la famille et de l'hétéronormativité, mais après, promis, on passera aux alternatives et aux moyens de lutte, ce qui permettra des articles un peu plus positifs !

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31 mars 2013 7 31 /03 /mars /2013 12:00

Les figures des parents sont quasiment omniprésents dans les albums pour tout-petits. J'avais déjà présenté plusieurs de mes chouchous  ici, mais j'en ai découvert deux nouveaux récemment. Deux livres cartonnés pour les tout-petits, pleins de tendresse et de douceur.

 

Le premier : une maman d'Alessandro Sanna chez Circonflexe

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Le livre présente des mères et leur petits de différentes espèces animales. On trouve sur la première page la maman, toujours accompagnée du texte "une maman", puis sur la page suivante la maman et son petit.

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Et sur chaque page, une déclaration d'amour inconditionnelle ou un geste tendre. Le tout avec des mots simples et sans jamais tomber dans la niaiserie. 

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J'aime beaucoup les illustrations. Des couleurs chaudes. L'aquarelle qui donne un petit effet de flou au dessin. Je trouve qu'énormément de douceur et de tendresse s'en dégagent. 

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Je trouve que ce livre est vraiment idéal pour un moment calin avec un tout-petit. Moi qui suis plutôt "stricte" dans ma lecture d'histoires (je lis le texte, point), celui-ci me donne envie, au fur et à mesure, de mettre en oeuvre ce qui y est illustré. Alors je plonge mon nez dans le cou du magicien, je le couvre de baisers, ou j'essaye de lui faire comprendre que pour prendre par la main il faut ouvrir les doigts...

 

Le deuxième : les mains de papa d' Emile Jadoul à l'école des loisirs. 

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Le livre s'ouvre sur des futurs parents et au centre de l'image les mains du papa posé sur le ventre de la maman : "toc toc toc". Il se clot sur un calin à trois, environ un an plus tard :

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Entre les deux, ce sont les mains de papa qui ont accompagné bébé. D'ailleurs, on se place "à hauteur de bébé" et on ne voit pas le corps du papa en entier. Ces mains sont démesurées, comme il doit les voir. 

Le trait de Jadoul est moins net que d'habitude, et comme pour le livre précédent, même si le style est très différent, je trouve que ce flou dans le dessin donne une impression supplémentaire de douceur et de tendresse. J'apprends ici qu'il a réalisé ce livre entièrement aux doigts, sans pinceau.  

Le texte n'est composé que de quelques mots, le plus souvent des onomatopées. 

 

Il ya les moments de calin, les moments de chahut :

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Il y a les moments d'exploration aussi : le toboggan, les bébés nageurs, la première descente en luge...

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J'aime l'idée des mains des parents qui accompagnent l'enfant tant qu'il en a besoin. Mais qui, le jour où il n'en a plus besoin, n'hésitent pas à le laisser partir : 

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"Et soudain... un... deux... trois... sans les mains !"

 

Petit détail, j'ai apprécié que les couleurs des vêtements du bébé soient neutres afin qu'on puisse s'imaginer comme on le souhaite une fille ou un garçon. 

 

 

Le magicien adore ces deux livres, que je lis très souvent (à tel point que je tarde un peu à les rendre à la bibliothèque, pas bien !). Comme ils sont cartonnés, il peut les manipuler, et commence à comprendre qu'on peut tourner les pages (pas encore qu'il faut le faire page par page et toujours dans le même sens pour qu'on puisse lire l'histoire). Bon, on a encore un peu de mal à lui faire comprendre que les livres de la bibliothèque, on ne les met pas à la bouche... 

 

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29 mars 2013 5 29 /03 /mars /2013 11:00

Cet article est également publié sur le blog des vendredis intellos.

vendredis intellos

 

 

Contre les jouets sexistes, ouvrage collectif aux éditions l'Echappée.

 

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J'ai eu la référence de ce livre sur un article de la mare aux mots consacré aux livres pour enfants non sexistes, et je l'ai commandé le jour même à la librairie. Je l'ai trouvé passionnant et j'ai eu envie de vous en parler. Voilà donc la première partie d'un compte-rendu du livre en six articles. 

En noir, le résumé du livre, en bleu, mes commentaires perso. J'ai gardé les mêmes exemples (type de jouet, marque) mais le livre date de 2007 et fait donc référence à des catalogues de cette époque, et j'ai préféré faire le lien vers les sites internet des marques citées et des jouets vendus aujourd'hui. En 6 ans, malheureusement, les choses ont peu évolué.

Ce livre a été écrit par des membres et sympathisants des associations  Mix-cité et du  Collectif contre le publisexisme. Il est très riche en notes, références bibliographiques, cependant afin d'alléger la lecture, j'ai fait le choix de ne pas les citer dans l'article afin qu'il ne soit pas trop long. Mais si vous désirez des références sur un sujet ou un chiffre, n'hésitez pas à me le demander !


Le livre rappelle en introduction l'inégalité homme/femme dans notre société, que ce soit dans la vie publique (voir le % de femmes à l'assemblée nationale), professionnelle (le salaire moyen des femmes ne représente que 75% du salaire moyen des hommes), privée (de 1986 à 1999, la part des hommes dans les taches domestiques est passée de 32% à 35,4%) ainsi qu'au niveau symbolique (changement de nom au moment du mariage, transmission du nom du père aux enfants...). "Les enfants, par conséquent les adultes de demain, seront-ils, seront-elles, moins sexistes ?"

Il propose ensuite deux grandes parties :  la première concerne "le sexisme dans les jouets", la seconde s'intitule "alternatives et luttes". 

 

Une idée importante est explicitée dès l'introduction et sera soulignée tout le long du livre : les différences entre garçons et filles sont dues à des injonctions

Les enfants comprennent très vite que le fait d'adopter un comportement ou un jeu de l'autre sexe est vu comme une transgression. "Les enfants reçoivent une foule d'informations explicites et implicites sur comment doit être une fille et comment doit être un garçon, sans laisser beaucoup de choix et sans tenir compte de la diversité des tempéraments et des personnalités (...). Les différences sont pratiquement toujours présentées comme des constats : ce sont en réalité des injonctions". 

Le livre prend alors l'exemple des albums jeunesse qui "apparaissent comme des supports privilégié du processus d'indentification" et souligne le nombre de héros beaucoup plus important que le nombre d'héroïnes. "Le lexique symbolique des images les instruisent très précocement sur les rôles sexués dans la famille et dans la société".  Alors que les hommes sont liés à l'éxtérieur, à la vie professionnelle, au pouvoir, les femmes sont liées à l'intérieur, au privé. On peut donner comme exemple "Martine petite maman" (j'ai d'abord été agacée de voir citer encore une fois Martine, alors que la série a déjà 50 ans, jusqu'à ce que je lise qu'actuellement, plus d'un million d'album de cette série sont vendus chaque année, ce qui m'a pas mal déprimé. Et vu les nouvelles déclinaisons proposées par Casterman, c'est malheureusement loin d'être fini).

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Ces constatations concernent également les romans, les contes, les manuels scolaires...

Bien sûr, il y a des albums qui proposent une vision différente, j'en ai d'ailleurs présenté quelques uns, comme Marre du Rose, mais on en reparle dans un autre article. 


"Certain-e-s légitiment l'usage des jouets sexistes en soulignant le fait que "les enfants sont libres de choisir". Or, les enfants choisissent leurs jouets d'abord pour se conformer au rôle que l'on attend d'eux-elles. Selon le psychologue Pierre Tap, "l'enfant en vient donc à aimer ce qu'il a le droit ou la possibilité de posséder, à apprécier des jouets qui peuvent être siens, et à rejeter les jouets qui ne font pas partie de son champ d'appropriation".

Ce passage me fait penser à une anecdote : temps d'accueil pour les moins de 3 ans et leurs parents à la bibliothèque, un petit garçon d'environ 2 ans arrive avec sa mère. Elle lui dit d'une voix enthousiaste : "chouette, tu vas pouvoir écouter plein d'histoires de voitures et de trains !". Il me semble évident qu'ensuite le choix des livres par le petit garçon ne peut pas être vraiment libre. 

Le jouet "oriente les compétences culturelles de l'enfant en cultivant des capacités physiques, psychiques et/ou émotionnelles spécifiques" et "conduit l'enfant vers les valeurs reconnues par la société où il-elle vit". "Le désir des enfants ne surgit pas toujours de lui-même; D'une part, les enfants (comme les adultes) désirent souvent ce qu'ils connaissent déjà (...), c'est-à-dire les jouets avec lesquels ils sont en contact, chez leurs camarades, dans les médias et dans les rayons des grandes surfaces. D'autre part le marketing rodé et agressif qui prend aujourd'hui les enfants pour cibles est là pour séduire, susciter le désir et aiguiller ces derniers dans les codes préexistants". 


Les jouets du premier âge : (les pages consacrées aux jouets du premier âge sont situées dans la première grande partie : le sexisme dans les jouets, mais je les mets dans cette introduction parce qu'il me semble que c'est un bon moyen d'illustrer qu'on ne peut pas parler de "libre choix" pour les jouets puisqu'ils sont genrés avant même que l'enfant soit en âge de choisir). 

"Avant même que les enfants n'aient conscience d'appartenir à tel ou tel sexe (ils et elles ne concoivent pleinement la différence des sexes que vers l'âge de trois ans), une éducation différenciée leur est donnée".

"L'environnement de la chambre, les couleurs, les décors, les vêtements présentent généralement une adéquation avec les codes de genre". Ils donnent comme exemple le catalogue éveil et jeux 2007 avec ses frises princesses ou ses frises chevaliers. (et sur le site d'éveil et jeux, on peut par exemple trouver une  chambre toute rose avec des "papillons et libellules (qui) séduiront toutes les petites filles.")Il y a peu, sur facebook, je suis tombée sur l'annonce du sexe de son bébé par une connaissance enceinte : "Le mystère est levé: pas besoin de repeindre la chambre bleue !" et elle développe plus bas en disant que si le bébé avait été une fille, elle aurait du la repeindre (en rose ?). 

chambre-bebe-rose-copie-1.jpgchambre-bebe-bleue.jpg

Peut-on penser qu'un enfant qui dort dans une de ces deux chambres choisira ensuite ses jouets sans contrainte ?


C'est également le cas pour de nombreux jouets. Très vite, on oriente les petites filles vers les poupées et les petits garçons vers des garages. Il n'y a qu'à jeter un coup d'oeil au site de Corolle, rose, qui s'adresse uniquement aux filles et qui parle de "petites mamans" pour désigner des petites filles de 18 mois. 

 

Je voulais insister sur deux phrases du livre : "Notre analyse des jouets vise en premier lieu à rendre visible la dimension idéologique des injonctions que l'on fait subir, parfois inconsciemment, aux enfants".

"Dans une moindre mesure et de façon moins consciente, nous sommes toutes et tous amené-e-s à avoir des comportements sexistes qui influent sur les enfants". On interprète ainsi différemment les réactions d'un bébé selon son sexe (j'en avais parlé ici).

 J'essaye de donner au magicien une éducation peu genrée, afin qu'il ait le plus de libertés possibles. J'essaye ainsi de lui proposer le maximum de jouets mixtes : 

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C'est un critère que nous avons également pris en compte au moment de la décoration de la chambre : pour le mobile, par exemple, on a préféré la version "éléphants" à la version "fleurs" ou "voiture". J'aime bien que le dragon qui décore sa chambre porte une petite fille plutôt que l'habituel chevalier :

IMG_0578.JPG

 

Certains de ses jouets ou de ses vêtements sont en revanche clairement connotés "garçons" : jeu d'empilement "bateau de pirate", peluche dragon, pyjama de cowboy ou avec un robot...

Et je me suis rendue compte que certaines de nos réactions étaient dues au fait que c'était un garçon. Par exemple, le magicien joue souvent avec un morceau de tuyau, qu'il secoue dans tous les sens. C'est devenu son "sabre laser". Je doute qu'on aurait réagi de la même manière si le magicien avait été une magicienne... De même, quand j'ai lu qu'avec des bébés garçons on était plutôt dans le rationnel et dans le mouvement et la découverte spatiale, alors qu'on était d'avantage dans l'affectif et l'intime avec une petite fille, je me suis interrogée sur notre comportement avec notre fils. On considérait comme "faisant partie de son caractère" son goût pour l'extérieur (quand il est dans les bras, il ne fait jamais de calin, il est toujours tourné vers l'extérieur, essaye de voir le plus loin possible, etc), mais on s'est rendu compte que c'était peut être un comportement qu'on avait encouragé (je me souviens quand il était tout bébé, on passait des heures à le faire regarder par la fenêtre, on lui décrivait ce qui se passait autour...). Est-ce qu'on aurait fait la même chose s'il avait été une fille ? Je ne sais pas. 

Je ne prétends donc absolument pas donner une éducation entièrement non genrée. Mais je pense qu'il peut être intéressant pour tous les parents de réfléchir à ses pratiques sur le sujet, et aux automatismes dont on ne se rend pas forcément compte mais qui sont bien présents. Et ce, afin de laisser à l'enfant le plus de possibilités pour se réaliser en tant que personne plutôt qu'en tant que garçon ou en tant que fille.

Et vous, vous avez réfléchi à la question ?

 

 

Vendredi prochain, je vais vous parler du rôle des jouets dans la construction des genres masculins et féminins.

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15 mars 2013 5 15 /03 /mars /2013 12:00

 Il parait que la bouseuse ne sait pas très bien parler de ce qu'elle aime et que quand elle conseille quelque chose, il faut le lire sans demander pourquoi elle le propose. Je confirme puisque c'est par elle que j'ai entendu parler de ce livre. Quelques jours plus tard, quelqu'un l'a rendu à la bibliothèque et au lieu de le ranger, je l'ai mis dans mon sac. 

 

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Le bleu est une couleur chaude de Julie Maroh (allez faire un tour sur son blog, il est chouette !). 

"La vie de Clémentine bascule le jour où elle rencontre Emma, une jeune fille aux cheveux bleus." (4e de couverture). Un coup de foudre pour une femme croisée dans la rue, et qu'elle retrouvera par hasard quelques temps plus tard.

C'est le journal intime de Clémentine que l'on découvre. Ses rêves, sa vie d'ado. Ses doutes. Comment réagir quand ce qu'on ressent va à l'encontre de ce qu'on avait imaginé, des préjugés qui nous ont été inculqués ? Comment réagir face à un entourage hostile ?

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Les dessins sont essentiellement en noir et blancs, relevés par des touches de bleu. Puisque dans son journal "il y a là tous mes souvenirs d'ados teintés de bleu. Bleu encre, bleu azur, bleu marine, bleu Klein, bleu cyan, bleu outremer... Le bleu est devenu une couleur chaude."

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Comme je vous le disais  , j'ai adoré cette BD. J'ai trouvé le ton très juste. Même si la BD consacre une part importante à l'homophobie de la société, à la douleur du rejet de la part de ses proches, ce qui m'a le plus touché c'est le cheminement intérieur de Clémentine, la difficulté à s'accepter telle que l'on est quand celle que l'on est n'est pas celle que l'on imaginait. 

Et c'est une très belle histoire d'amour. 

"Je veux tout faire avec toi. Tout ce qu'il est possible de faire en une vie". 

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  • : Bibliothécaire, maman du magicien (né en 2012) et de la puce (née en 2015), je parle de mes coups de coeur en littérature jeunesse, de ma vie, de mes ballades... J'ai un autre blog, http://filledalbum.wordpress.com où je réunis des ressources pour une littérature jeunesse antisexiste.
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